Trek sur la Rivière Chadar (INDE, Himalaya) Janvier 2018

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jour 1 vendredi 12 janvier 2018

Hier soir j’ai dormi à l’hôtel IBIS de Roissy car mon avion décolle à 9h ce matin. Je procède à l’édition de ma carte d’embarquement et à l’enregistrement de mon bagage (22 kg), puis je me commande un café dans un Starbucks. Tout à coup je vois passer un monsieur avec les mêmes bottes que moi…, je l’interpelle, c’est Bernard un Français, l’un de mes compagnons d’aventure.On part ensemble pour Amsterdam. Une fois arrivés là-bas, en attendant le vol pour New Delhi, on récupère François, un Suisse, et Michel, un Belge. C’est facile, ils ont eux aussi les mêmes bottes que nous, des bottes caribous de la marque SOREL On décolle pour New Delhi à 12h45.

Jour 2 samedi 13 janvier 2018

On arrive à New Delhi à 1h15 du matin heure locale. Il nous faut aller au terminal 2 qui est l’aéroport pour les vols intérieurs. Il est environ à 10 minutes à pied. Cet aéroport domestique  est tenu par des militaires…on paye une taxe de 3 000 roupies car nos bagages sont trop lourds sur ce vol intérieur, c’est maximum 15 kg… On passe tous  les contrôles et puis on patiente…, patiente…, patiente… en faisant connaissance,  notre avion décolle à 7h30.

On arrive à Leh à 3 600 m d’altitude, qui est une ville de 10 000 habitants située au Nord de l’Inde dans la province du Cachemire, région du Ladakh, après avoir survolé l’Himalaya  sous le soleil. C’est grandiose et impressionnant. On  passe  les formalités sans encombre et dehors sous un beau soleil mais par une température de -17° nous attend Tashi, qui sera notre guide et chef d’expédition.

On monte dans le taxi direction la guest house (une guest house en Inde c’est quand un habitant vous loue une partie de sa maison). Ok mais une guest house à Leh, c’est une maison sans eau courante à 3 600 m d’altitude et par -20° cela  fait longtemps  que l’eau est  gelée dans les tuyaux… (Depuis début novembre en fait).

Les toilettes, c’est une cabane en pierre au fond du jardin, avec du jour entre chaque pierre et un trou dans le sol. Bref, on se gèle littéralement les fesses. Ici le froid est très sec, conclusion il n’y a jamais de givre le matin. Je passe la fin de la matinée avec Tashi pour changer nos euros  chez un agent de change et les euros destinés aux monastères en roupies. En gros 1 euro = 73 roupies.

L’après-midi nous faisons une petite ascension pour aller vers un monastère qui domine la ville de Leh, environ 200 m de dénivelé. Leh est une ville poussiéreuse, car il y a une rue principale et le reste, c’est des chemins de terre. La misère, les chiens errants, les vaches sont partout. On boit du thé devant la maison pour se réchauffer.

Le soir, les propriétaires nous apportent du bois pour alimenter  le poêle de la pièce dans laquelle nous sommes installés. C’est une pièce carrée, le poêle est au milieu et 5 matelas sont disposés autour, sur le sol. Le bois est une denrée coûteuse à Leh et ce qu’on nous a apporté a été payé d’avance  par Tashi.

J’ai légèrement mal à la tête le soir à cause de l’altitude, je me coule dans mon duvet, très performant, il fait 10° dans la pièce.

 

 

Jour 3 dimanche 14 janvier 2018

Même si mon duvet est performant, cette première nuit est un peu difficile car la transition est brutale, l’altitude, la température au réveil dans la pièce 2°. J’ai bu plusieurs fois dans la nuit mais j’ai toujours mal au crâne. Le petit déjeuner nous est servi dans la cuisine de la maison : omelette et toasts au pain de mie et à la confiture avec 2 tasses de thé chaud. Vers 11h30 nous partons pour le festival du monastère de Spituk. Il y a un monde incroyable, il est trop tard et nous n’arrivons pas à entrer.

Tous les ans, chaque monastère organise une fête sous forme de portes ouvertes et les gens viennent très nombreux pour remercier les moines de leurs actions. En effet, dans cette région du monde très isolée, ce sont les monastères qui assurent l’éducation des enfants.

dés 5 ans l’enfant est scolarisé, dans le monastère pour 3 mois, puis il rentre chez lui pour 15 jours et ainsi de suite, sauf du 15 décembre au 15 février, période où il fait trop froid, et donc ce sont les grandes vacances.

C’est dans le but d’aider les différents monastères à poursuivre leur mission d’éducation auprès des enfants que nous allons nous y rendre pour leur donner de l’argent.

Le midi nous mangeons sur place quelques « momos » (sorte de raviolis fourrés aux légumes ou à la viande) avec 2 tasses de thé et nous croisons quelques habitants locaux. De retour vers 15h à la guest house, c’est le repas pour tout le monde dans notre chambre à 8°.

Nous avons le wifi dans la guest house, en revanche pas de réseau téléphonique (je ne retrouverai du réseau que 10 jours plus tard à New Delhi). Le soir on mange du riz blanc et du chou (des lentilles en plus pour les autres, mais pour moi c’est trop épicé et mon estomac ne le supporte pas). Nous nous couchons, il fait 8° dans la chambre et -15° dehors.

 

 

Jour 4 lundi 15 janvier 2018

Ce matin et à notre demande, nous nous levons tôt pour retourner au festival du monastère de Spituk et pouvoir accéder à la cour de cérémonie. Nous petit-déjeunons (même menu que la veille : 2 tasses de thé, une omelette et du pain de mie grillé avec de la confiture). Nos porteurs arrivent pour charger le 4×4.

Ce sont des Zanskarpas (habitants du Zanskar) et plus précisément des paysans du Zanskar qui ne peuvent cultiver la terre en hiver….Nous repartons pour ce festival de Spituk.

Nous arrivons à entrer dans la cour intérieure pour voir le spectacle des moines à base de chants. C’est magique et envoûtant. Ensuite nous prenons la route pour Chilling, environ 1 heure de route, nous prenons une photo à la jonction du fleuve Zanskar que nous voyons pour la première fois et du fleuve Hindus.  

A ce point  nous vous devons un éclaircissement : En été le fleuve s’appelle le Zanskar, et en hiver il s’appelle le Chadar. les locaux considèrent que le fleuve étant gelé l’hiver, ce n’est pas le même que l’été.

 

 

Enfin nous arrivons. Notre groupe est composé de 16 personnes : le guide en chef Tashi, 1 cuisinier, 9 porteurs et nous 5. Les  9 porteurs, les Zanskarpas, sont en fait des paysans du Zanskar. Ils portent nos sacs, maximum 15 kg, plus le leur autour de 7 kg, donc 22 kg en tout. Ils ont des traîneaux en bois qu’ils tirent sur la glace et qui peuvent être portés en sacs à dos dans les parties montagneuses. Le cuisinier est un cran au-dessus. Il porte son sac, les réchauds, l’essence pour alimenter le réchaud, les ustensiles de cuisine en métal. Et enfin le guide est le chef d’expédition, il porte juste un petit sac à dos comme nous. Nous nous équipons, bottes, crampons, bonnet, bâtons, gants….et c’est parti pour la remontée du Chadar. Nous marchons tranquillement pendant environ 45 minutes pour nous familiariser avec le milieu et notre équipement. La première petite chute est pour Michel le Belge.

Nous faisons une première pause et Tashi nous indique que nous allons dormir là, sur une petite partie sableuse avec une avancée de la roche au-dessus qui nous protégera des éventuelles chutes de pierre….. Nous installons notre bivouac pendant que les porteurs vont chercher du bois pour faire un feu.Nous dinons. Tout ce que nous mangerons dans la semaine, c’est nous qui l’avons amené. C’est à la fois trop difficile de s’approvisionner sur Leh, la qualité serait insuffisante, et cela couterait beaucoup trop cher à nos porteurs. Nous avons amené  4 kilos chacun. (Pour ma part il y avait des fruits déshydratés, un bloc de canard séché, des pains au  chocolat, des amandes, du jambon  de Serrano sous vide, des crêpes, du saucisson, du gruyère. Après le repas, nous rentrons dans nos duvets pour la nuit, il fait plutôt chaud ce soir…-5°. Au fait je ne l’ai pas encore dit mais depuis que je suis arrivé à Leh, je dors avec un bonnet… ça fait drôle d’avoir un bonnet en permanence sur la tête…

Après 1 heure je me réveille déjà, mes chaussettes étaient légèrement humides et du coup, j’ai très froid aux pieds (1ère leçon : absolument se couler dans le duvet le soir avec des vêtements secs). Du coup, je me relève à la lumière de ma lampe frontale, j’enlève mes chaussettes humides, m’essuie les pieds, mets des chaussettes propres et me rendors… enfin façon de parler, avec le froid, la fatigue, l’altitude, les nuits sont très hachées, en gros on se réveille toutes les heures.

 

 

Jour 5 mardi 16 janvier 2018

Aujourd’hui, on  marche 5 heures environ… parce que notre groupe avance assez vite. Il est déjà 14h et Tashi nous dit qu’on va s’installer dans une grotte pour la nuit. Cette grotte se situe sur le côté droit dans la falaise à environ 50 m de hauteur. Il fait -5°, on boit du thé pendant que nos porteurs vont chercher du bois. Justement un « Zanskarpa » revient avec carrément un arbre sur les épaules qu’il remonte jusqu’à la grotte. On allume un feu et je fais sécher mes chaussettes au-dessus… Quand on se couche vers 19h30, il fait -11°.

 

 

 

 

 

Jour 6 mercredi 17 janvier 2018

On se lève à 7h, il fait -18° et on prend le petit-déjeuner habituel du matin, c’est-à-dire 2 tasses de thé et un pain au chocolat réchauffé sur le feu, car tous les matins les Zanskarpas nous allument un petit feu pour nous réchauffer et lancer la journée. 2 heures plus tard on fait une autre pause, encore 2 tasses de thé et on mange des crêpes bretonnes. On fait ce jour-là 6 heures de marche. En arrivant sur Nierak (l’endroit où on doit dormir), la glace n’est plus assez sûre pour que nous marchions sur le fleuve. Nous enlevons nos crampons et commençons notre première petite escalade pour passer à flanc de montagne, nous avons rapidement le souffle court. On arrive enfin à Nierak….c’est en fait un hameau de 3 maisons. Nous rentrons avec Tashi dans une maison où une habitante nous offre le thé dans sa cuisine en terre battue et nous prenons en photo les 3 enfants et la brebis….le logement est très spartiate.

 

 

Jour 7 jeudi 18 janvier 2018

Et voilà c’est reparti, lever 7h comme d’habitude. On a déjà fait environ 50 km sur le fleuve gelé, il reste normalement quelques kilomètres à faire avant de monter vers le monastère de Lingshed. On fait une photo tous ensemble car mes 4 compagnons, qui disposent de plus de temps, vont poursuivre l’aventure plus loin. Oui mais voilà, 3 km avant de pouvoir monter au monastère de Lingshed, le fleuve n’est plus gelé. Bernard passe la jambe à travers la glace ainsi que 2 porteurs. Tashi dit stop, on ne peut plus avancer et à cet endroit on ne peut pas comme hier passer à flanc de montagne : nous sommes entourés par des parois rocheuses totalement verticales… Il existe une seule solution, il faut revenir en arrière et faire l’ascension de trois cols, un 5 000 m et deux 4 600 m pour rejoindre le monastère de Lingshed. On revient sur nos pas pendant 2 heures, on est à 3 800 m et on commence l’ascension. Vers 4 200 m, on aperçoit des yacks et deux Zanskarpas qui viennent de plus haut (leur ferme est à  4 800 m) pour faire brouter un peu d’herbe aux yacks. En effet, au-dessus de 4 200 m tout est enneigé, donc rien à brouter. On mange avec eux et ils remontent avec nous et les yacks vers le lieu-dit Kumpatayouk. On prend des photos sur notre premier col à 4 600 m près d’un stupa.

 

 

 

 

 

 

 

C’est un petit monument en pierre érigé en haut de chaque col qui, dans la philosophie bouddhiste, remercie les dieux pour avoir permis au voyageur d’atteindre ce point. On  descend puis on remonte pour arriver à 4 800 m à cette fameuse ferme/refuge, dans laquelle nous allons passer la nuit. En général elle sert de refuge uniquement pour les treks d’été. On s’installe autour du poêle pour se réchauffer. Le soir nous sommes invités à manger avec les habitants de cette ferme/refuge. La famille est composée d’un couple et de 5 enfants. On boit du « Chang » c’est la bière artisanale locale faite à partir d’orge. Les Zanskarpas chantent une chanson puis c’est notre tour. Je me lance en entamant « Santiano… » Avec le « Chang » et les chansons nous passons une soirée chaleureuse malgré le froid et l’altitude.

 

Jour 8 vendredi 19 janvier 2018

-25° ce matin au démarrage, ça pique un peu…. Et on monte directement, il faut gravir ce fameux col à 5 000 m. Chacun marche à son rythme petit pas par petit pas. En haut du col on fait une pause et on commence notre descente sur le monastère de Lingshed à 4 200 m. Enfin on l’aperçoit ce fameux monastère. A l’entrée un panneau indique  « Monastère électrifié depuis août 2016 »… Ce panneau est beau, il traduit à lui tout seul l’isolement absolu du lieu. On visite ce monastère et on fait un don de 50 000 roupies. Les moines nous offrent du thé, on mange ensemble.

C’est l’heure de se séparer. Mes compagnons disposent de 8 jours de plus que moi et vont donc pouvoir aller jusqu’aux monastères de Karsha et de Tungri pour faire des donations. Moi je fais demi-tour avec Tamchos, mon guide pour le retour, et on refait le chemin en sens inverse.

 

 

 

On repasse donc par le col de 5 000 m.

Puis on redescend sur la ferme de Kumpatayouk où nous avons dormi la veille. Dure journée, 7 heures de marche, 2 fois le même col à 5 000 m… Le soir j’invite Tamchos  et Pisci (mon cuisinier porteur qui nous a attendu ici) à dormir dans la même pièce que moi. C’est mieux isolé, il y a des matelas et surtout moi j’ai  droit à un peu de bois pour chauffer la pièce à l’aide du poêle. Avec ce poêle quand on se couche il fait 8°… Je dors quand même bien grâce au matelas, et du coup le matin quand nous  nous réveillons il fait une température acceptable pour notre chambre… -2°.

 

 

 

 

Jour 9 samedi 20 janvier 2018

 

 

 

 

 

 

 

 

On a marché très vite ce jour-là, de 8h à 16h. Notre objectif était de dormir une seule nuit le long du fleuve  car  nous savions que nous ne pourrions pas dormir dans un refuge. Il faisait froid car le vent s’est levé, même les Zanskarpas avaient froid…. (quand ils ont froid ils mettent leurs gants). Vers 16h on trouve un petit surplomb rocheux, c’est là que nous passerons notre dernière nuit sur le fleuve gelé, à l’abri des chutes de pierres. A ce stade il faut que nous détaillions un peu plus le cérémonial du repas du soir. Dès 17h30 tu fais chauffer de l’eau. Bien que la température d’ébullition se situe autour de 88° à cette altitude (on perd environ 1° tous les 300 m), l’eau va mettre très longtemps à bouillir. Ensuite le cuisinier prélève une partie de cette eau pour nous servir un thé et il met ce soir-là un peu de poulet dans la casserole avec le reste de l’eau (unique fois où nous  avons mangé de la viande à part le saucisson et le jambon que nous avions apportés). Il y a un seul réchaud. Une fois la viande cuite, il faut cuire les légumes sans le poulet. Enfin on mélange le tout pour servir le plat chaud. Et en gros on mange à 19h, ce soir-là il y a du vent, nous sommes peu protégés, il fait froid…-15°. On termine notre repas et on saute dans nos duvets.

 

Jour 10 dimanche 21 janvier 2018

-25° ce matin, on arrive quand même à dormir par ce froid et avec un matelas très fin… mais en gros par petites séquences de 45 minutes à chaque fois. On reprend notre marche avec mon cuisinier et mon porteur guide.

Vers 14h nous sommes revenus à notre point de départ d’il y a 10 jours. Nous reprenons un 4×4,   1h30 de piste de montagne, puis 1h30 de route et me voilà revenu à la guest house de Leh.

Je donne 3 000 roupies de pourboire à Pisci soit environ 40 €, et 3 400 roupies (environ 45€) à Tamchos. Avec cette somme, ils peuvent nourrir leur famille pendant 6 mois…

 

 

Jour 11 Lundi 22 janvier 2018

Je suis tout seul dans la guest house jusqu’à vendredi 26 janvier, date de mon retour à la maison, dans une ville où il n’y a rien à faire. En effet, nous avons fini le trek plus vite que prévu pour plusieurs raisons. D’abord, nous avons commencé l’expédition le lundi 15 janvier au lieu du mardi 16 janvier car le fleuve était immédiatement praticable et Tashi a vu que nous étions tous déjà bien acclimatés. Ensuite, nous n’avons pas eu besoin de la journée de repos prévue au monastère de Lingshed. Enfin, nous avons réussi à faire le retour en 3 jours au lieu de 4. Bilan : 3 jours d’avance.

Je décide donc de rentrer plus tôt, soit le mercredi 24 janvier. Heureusement ce jour-là le wifi était à peu près correct, mais cela me prendra quand même la journée à partir de mon smartphone.

Je réserve sur Air India le vol Leh New-Delhi tôt le matin, une fois la confirmation reçue par mail, je vais à la seule boutique internet de Leh pour faire imprimer mon billet. Au départ de Leh, l’aéroport est tenu par des militaires qui exigent des billets imprimés. Si tu n’as pas de billet papier, tu ne pars pas. Je réserve alors avec mon smartphone, un vol New Delhi Paris qui fait escale au Bahreïn, c’est moins cher.

Jour 12 Mardi 23 janvier 2018

Je tue le temps comme je peux : le matin balade à pied vers le centre-ville puis retour, et l’après-midi… rebelote…

 Jour 13 Mercredi 24 janvier 2018

Tout se passe bien avec tous mes avions, et en plus dans le vol Bahreïn Paris, nous ne sommes en tout et pour tout qu’une petite vingtaine, chaque passager dispose de toute une rangée de sièges et je dors très bien et sans bonnet pour la première fois depuis 12 nuits.

Jour 14 Jeudi 25 janvier 2018

Je me pose à Paris autour de 7h du matin, j’attrape un train et me voici gare de Lille-Europe, je prends le métro et Christine me récupère au terminus à Saint-Philibert, et voilà dans la voiture je commence déjà à raconter la magie du Chadar….